Même chez les catholiques, la notion de miséricorde reste mal comprise. Ses relations avec la justice et le pardon ou encore avec la tolérance et le relativisme font souvent débat. Le Père Bernard Sesboüe, professeur de théologie et auteur d’une quarantaine de livres, revient sur ces notions. Pour le jésuite, la miséricorde est “le sentiment de générosité qui jaillit dans un cœur devant une détresse.”
La notion de miséricorde est souvent assez floue, même dans l’esprit des catholiques. Comment la définiriez-vous ?
Bernard Sesboüé: La miséricorde recouvre deux situations. Celle d’une personne en détresse radicale selon la parole de Jésus dans l’évangile de Matthieu (25): “J’avais faim, j’avais soif, j’étais malade, j’étais en prison, vous m’avez visité etc.” Donc la miséricorde c’est le sentiment de générosité qui jaillit dans un cœur devant une détresse.
Il y a ensuite une miséricorde plus particulière devant la détresse due au péché. Le pécheur est dans une situation de malheur, qu’il a causée. A ce titre, il entre dans la catégorie des grandes détresses et mérite précisément la générosité des autres. Dans la miséricorde il y a à la fois un sentiment d’amour, de bienveillance, d’aide, et le souci d’une action d’une efficacité. Être miséricordieux simplement en parole ne suffit pas. La miséricorde est une générosité qui peut coûter très cher.
“Il ne faut surtout pas penser la rédemption chrétienne en termes de compensation. Elle est un don qui dépasse infiniment la réalité et le poids du péché.”
C’est ce qu’expliquent les paraboles de l’évangile.
On parle de l’évangile de Luc comme celui de la miséricorde parce que nous y trouvons les trois paraboles de la brebis perdue, de la drachme perdue et celle de l’enfant prodigue. Dans les trois cas, la générosité se développe d’autant plus face à une situation de détresse.
Le berger qui quitte les 99 brebis, qui n’ont pas besoin de lui, pour aller rechercher et retrouver la brebis perdue exerce la miséricorde, car il est touché au profond de son cœur par le fait que cette brebis risque de mourir ou d’être mangée par d’autres bêtes. Il veut son bien.
Dans l’histoire de la pièce d’argent perdue, il s’agit davantage du simple fait d’avoir perdu quelque chose de cher, d’important, puis de retrouver la joie. En soit, perdre quelque chose est très désagréable, mais on n’en meurt pas. Mais la parabole nous sensibilise à la joie de la femme qui après avoir balayé toute sa maison retrouve sa pièce. L’exercice de la miséricorde vous donne ce sentiment de joie qui est d’ailleurs différent et préférable à la satisfaction d’avoir accompli une bonne œuvre. La joie est désintéressée, spontanée, gratuite. Cette femme veut communiquer sa joie de la découverte, elle va l’annoncer à ses voisines.
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> Photos : Rembrandt et © Maurice Page
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