Dans une lettre adressée à toute la Compagnie de Jésus, le P. Arturo Sosa a annoncé le 14 novembre qu’était lancé le processus menant à la possible béatification du P. Pedro Arrupe, 28ème Supérieur Général de la Compagnie.
Au cours des derniers mois, le P. Sosa avait partagé l’intention de la Compagnie de faire avancer ce dossier. Les nombreuses réactions qu’il a entendues et reçues l’ont confirmé dans son projet. Désormais, le Père Pedro Arrupe est connu sous le nom de « Serviteur de Dieu ».
La cause a été introduite au Vicariat de Rome, lieu de sa mort. Après un temps de prière et de réflexion attentive, la Compagnie a demandé que commence le discernement ecclésial sur l’héroïcité de ses vertus. Le Père Arturo Sosa sj, actuel Supérieur Général, adresse cette lettre à la Compagnie de Jésus, dont nous publions des extraits :
« Ces derniers mois, lorsque j’ai partagé cette intention dans les divers lieux où je me suis rendu, j’ai pu vérifier personnellement combien le souvenir et l’héritage du Père Arrupe demeurent vivants. Venues du monde entier, d’éloquentes lettres de postulation, parfois véritablement émouvantes, confirment la présence de ce désir dans divers secteurs de l’Église où est reconnue la réputation de sainteté du Père Arrupe : une réputation spontanée, stable et continue.
Un peu partout, des jésuites et des non jésuites ont été témoins des qualités exceptionnelles du Père Arrupe : son désir de réaliser en tout la volonté du Père, son enracinement en Jésus Christ, sa confiance en l’Esprit Saint comme guide de l’Église, sa loyauté à toute épreuve envers le Saint Père, « Vicaire du Christ sur la terre », son esprit missionnaire, sa fidélité personnelle à notre mode de procéder, sa sensibilité face aux drames sociaux, son amour et sa proximité des pauvres. Le Père Arrupe apparaît de manière éminente comme un « homme passionné de Dieu et de l’Église ».
Si, en ce 111ème anniversaire de la naissance du Père Arrupe, nous regardons vers le passé, nous pouvons reconnaître sa grande contribution à la Compagnie et à la spiritualité ignatienne : comment il a aidé à redécouvrir les Exercices spirituels et d’autres textes essentiels de Saint Ignace ainsi que la démarche de discernement personnel et communautaire. Nous nous rappelons qu’il demandait à la Trinité – en qui le charisme ignatien trouve son inspiration – de « comprendre la signification aujourd’hui, pour moi et pour la Compagnie, de ce qui a été autrefois manifesté à Ignace ». C’est ainsi que la vie du jésuite a été rénovée dans ses différentes dimensions, la consécration, les vœux, la communauté et la mission. De manière générale, le Père Arrupe a agi en sorte que la Compagnie, l’Église et la société puissent se nourrir de toute la richesse ignatienne adaptée au temps présent.
Une expérience semblable a été aussi vécue avec les consacrés, les prêtres et les laïcs, avec lesquels le Père Arrupe était en rapport permanent. Sa forme de présence, enthousiaste, libre, sage et fidèle au sein de l’Église conciliaire, illuminée par l’Esprit, manifestait le désir d’intégrer les meilleures valeurs de la tradition aux changements nécessaires pour adapter le christianisme aux temps nouveaux. Le Serviteur de Dieu a été élu Supérieur Général en 1965 et il a donc pu participer encore à la dernière session du Concile Œcuménique Vatican II. Ses 18 ans à la tête de la Compagnie – et ses 17 ans à la présidence de l’Union des Supérieurs Généraux – ont coïncidé avec la mise en oeuvre du Concile. Dans les années qui ont suivi Vatican II, il a contribué avec une « fidélité créatrice » à son application, au point d’être qualifié par le Père Peter-Hans Kolvenbach, en 2007, de « prophète de la rénovation conciliaire ». De même, en 2011, le Père Adolfo Nicolás, en se référant à la même époque, rappela l’insistance du Père Arrupe sur le fait que « l’Esprit de Saint Ignace nous guide et nous dirige en ce moment tellement important de la vie de l’Église », une Église qu’il a toujours voulu servir inconditionnellement.
Porté par une vision universelle et convaincu de la richesse de la diversité culturelle, le Père Arrupe a stimulé l’inculturation dans son action missionnaire de transmission de la Bonne Nouvelle, il a répondu à l’appel des réfugiés, il a conduit la Compagnie à s’engager, au service de la foi, contre toute injustice et contre l’incroyance, il a invité nos élèves à être « des hommes et des femmes pour les autres », il a promu la réconciliation, l’œcuménisme et le dialogue interreligieux… En même temps, attentif au plus particulier, il traitait chaque personne avec grand respect, l’écoutant et lui faisant confiance comme on fait confiance à quelqu’un qui apporte des dons particuliers de l’Esprit pour l’ensemble du corps. Cette attitude était une autre expression de sa confiance dans le Seigneur, une confiance confortée, jour après jour, par la pauvreté et la simplicité de sa vie quotidienne. Jusqu’à la fin, il a rayonné une grande bonté, et cela avec une profondeur encore plus grande lorsque, à cause de sa maladie, il a su qu’il était totalement dans les mains de Dieu. »
P. Arturo Sosa, Supérieur général de la Compagnie de Jésus, à Rome, le mercredi 14 novembre 2018
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> Source : Curie jésuite à Rome