Le christianisme est arrivé au Japon par l’action du jésuite saint François-Xavier en 1549. En quelques décennies, le christianisme s’est développé et est devenu une église florissante. Combattu par la suite violemment, il a fait l’objet de nombreuses persécutions pendant 250 ans.
Le 15 août 1549, trois jésuites espagnols, Saint François-Xavier, Cosme de Torres et Juan Fernández arrivèrent à Kagoshima au Japon et introduisirent le christianisme. À la fin d’octobre 1550, Xavier et Juan Fernández demandent à l’Empereur une autorisation pour prêcher dans tout le pays.
Pendant les deux années durant lesquelles François-Xavier demeure au Japon, les conversions furent nombreuses.
L’activité missionnaire se poursuivit grâce à l’implication de plusieurs jésuites. Ainsi, Cosme de Torres, entre 1551 et 1570, multiplia les succès initiés par Xavier en prenant en compte l’esprit et les coutumes japonais. Diverses œuvres ouvrirent et les premiers autochtones entrèrent dans la Compagnie de Jésus.
Une diffusion rapide de la foi
Ainsi, l’Église catholique commença à se développer avec des paroisses, collèges et hôpitaux à Kyoto, Osaka, Yamaguchi et dans la région de Kyushu. La foi s’étendit parmi la noblesse féodale et les samouraïs, comme dans le peuple entier.Nous savons par le P. Cabral sj, qu’en 1576 ont été baptisées plus de 50000 personnes depuis l’arrivée des jésuites au Japon. À cette même date, les religieux de la Compagnie de Jésus étaient 75, répartis entre étrangers et japonais.
En 1579 arrive au Japon le Visiteur des Indes Orientales de la Compagnie, le P. Alessandro Valignano, sj. Il présenta un programme pour la formation presbytérale des Japonais, par la création d’un petit et d’un grand Séminaire. En janvier 1582, la Compagnie de Jésus éleva la mission du Japon (qui incluait Macao) comme Vice-Province. Mais tout ce travail fructueux fut remis en cause quand le 25 juillet 1587, le Gouverneur Hideyoshi décréta l’exil des jésuites, les forçant à se retrancher dans les îles de Hirado jusqu’au départ de la flotte portugaise pour Macao. Les églises furent fermées puis détruites peu après. À partir de 1596, commença un temps de persécution. L’Église catholique japonaise devint une Église clandestine, dont l’histoire fut jalonnée de nombreux martyrs.
Les 26 martyrs de Nagasaki
En 1590, la Compagnie comptait au Japon 140 jésuites, locaux ou étrangers, qui demeuraient illégalement sur le sol japonais. Après de grandes controverses avec les jésuites en Orient et devant le Saint Siège, les franciscains et un dominicain s’établirent au Japon dans les premières années de mandat du Vice-Provincial jésuite Pedro Gómez (1590-1600).
Alors que le dictateur Hideyoshi avait permis oralement aux missionnaires de résider au Japon, il ordonna en 1597 qu’un groupe de 6 franciscains, 3 jésuites et 17 laïcs soient crucifiés et tués à coup de lances à Nagasaki (le 5 février 1597), et leurs corps furent laissés sur les croix pendant neuf mois. Parmi eux, le jésuite Paul Miki et le franciscain Pedro Bautista. Ils sont connus comme les 26 martyrs de Nagasaki et furent canonisés par le Pape Pie IX en 1862. Au Japon, leur fête est célébrée le 5 février.
Hideyoshi confirma par écrit en mars 1596 l’ordre d’exil de 1587. Cependant, à partir de janvier 1598, à cause de la maladie du dictateur, les missionnaires purent circuler sans entrave dans plusieurs régions du pays.
À partir de 1600, dans une situation politique critique, les exécutions de plusieurs chrétiens notables recommencèrent. La situation empira sous l’administration de Tokugawa à Edo (actuelle Tokyo) en 1603, quand la persécution contre les Chrétiens se fit plus sévère encore. À cette époque, les Catholiques au Japon étaient environ 400 000, et plusieurs dizaines de milliers d’entre eux furent martyrisés au début de cette époque.
Une répression sanglante
Pendant ce temps, les jésuites constituèrent la Province du Japon en 1611 avec Valentim Carvalho comme premier Provincial. En 1612 se déroule la persécution sanglante d’Edo (Tokyo) et Suruga, causant de nombreux martyres. En 1614, l’édit définitif d’expulsion des missionnaires et d’annihilation du christianisme fut signé par Tokugawa Hidetada (Shogun depuis 1605) à Edo. Les Chrétiens furent recensés, et les autorités laissèrent passer un mois avant de les forcer à l’apostasie. Les laïcs martyrisés furent nombreux.
Depuis le décret de Hidetada jusqu’à la mort du dernier jésuite en 1644, 93 religieux de la Compagnie de Jésus donnèrent leur vie pour leur foi, auxquels il faut ajouter quatre autres par empoisonnement à Hirado en 1590, et trois crucifiés par Hideyoshi en 1597. Parmi eux, 3 ont été canonisés, 37 béatifiés et les autres ont eu leur cause de béatification introduite.
Après 1644, seuls 4 jésuites restèrent au Japon, qui s’étaient auto-exclus de la Compagnie pour avoir apostasié sous la torture : le Vice-Provincial Cristóvão Ferreira, le Provincial Pedro Marques senior, Giuseppe Chiara (le P. Sebastiao Rodrigues dans le film), et le frère Andrés Vieira. Selon certaines rumeurs, Ferreira serait revenu sur son apostasie et serait mort martyr mais il n’existe aucune preuve.
De 1644 à 1773 (année où la Compagnie de Jésus est temporairement supprimée), la Province du Japon se développa en exil à Macao et aux Philippines. De là-bas, les missionnaires maintinrent le contact avec le Japon par l’intermédiaire de commerçants, majoritairement chinois et quelques coréens, qui réussirent à donner des informations régulières sur les persécutions envers les Chrétiens.
« Catholiques clandestins »
Alors qu’au milieu du xxe siècle, les ports furent rouverts aux étrangers, et que les missionnaires revinrent au Japon où ils trouvèrent encore quelques « catholiques clandestins » (1), la Compagnie tarda à revenir. Elle ne le fit pas avant septembre 1906 quand la 25e Congrégation Générale de la Compagnie de Jésus reçut un postulat de Pie X pour restaurer l’ancienne mission jésuite au Japon et, particulièrement, pour y fonder une institution d’études supérieures.
Le 18 octobre 1908 arrivèrent de nouveau au Japon trois jésuites, originaires d’Angleterre, d’Allemagne et de France. Après en avoir obtenu l’autorisation, l’Université Sophia fut fondée en 1913. En 1923, le Saint Siège confia à la Compagnie le vicariat apostolique d’Hiroshima, récemment érigé. Les activités apostoliques s’étendirent par la fondation de nouvelles missions ; avec l’aide de religieuses, les oeuvres éducatives et sociales se développèrent.
La Province jésuite d’Allemagne Orientale à partir de 1933, et celle de Tolède (Espagne) à partir de 1934, commencèrent à collaborer avec la mission en envoyant des jésuites et d’autres aides. Ce mouvement inclut quelques années plus tard une autre Province espagnole, la Bétique (Andalousie et Canaries).
L’influence du P. Pedro Arrupe sj
Le 13 mars 1942, le jésuite espagnol P. Pedro Arrupe sj, fut nommé Maître des novices et recteur de Nagatsuka. La date historique du 6 août 1945 : la ville de Hiroshima fut détruite par la bombe atomique. Le Noviciat voisin de Nagatsuka se transforma en un refuge improvisé et en hôpital pour de nombreuses personnes, auxquelles le P. Arrupe, avec ses connaissances médicales, apporta une aide importante. Arrupe devint des années plus tard le Père Général de la Compagnie de Jésus (1965-1985), charge qu’occupa aussi de 2008 à 2016 un autre espagnol établi au Japon, le P. Adolfo Nicolás sj.
En 1949 fut célébré solennellement le 4e centenaire de l’arrivée de saint François-Xavier au Japon. Aujourd’hui résident au Japon quelques 200 jésuites, dont 30 % de japonais. L’éducation est un des piliers de leur travail. Ils s’appuient sur des centres spirituels, des centres pastoraux, des paroisses, des collèges et l’Université Sophia.
À Nagasaki, la Compagnie a aujourd’hui un Musée des Martyrs. Centré sur l’histoire chrétienne du Japon, il présente le témoignage de ses martyrs. La colline sur laquelle il se tient, ainsi que ses abords, ont vu la mort d’environ 600 chrétiens, de nombreuses nationalités ; parmi eux, 45 étaient jésuites. Elle a été érigée en sanctuaire diocésain il y a quelques années.
>> Pour en savoir + :
Pedro Arrupe missionnaire au Japon
Pedro Arrupe dans un pays en guerre
Frère Lorenzo Ryosai de Hizen : le premier jésuite japonais (1525-1592)