Olivier Paramelle prononcera ses derniers vœux le 2 février prochain en l’église Saint-Ignace. Nous retraçons ici son parcours.
L’effervescence de mai 68 était encore palpable. Je suis arrivé quelques mois après à Bourg en Bresse, entre les étangs de la Dombes foisonnant de carpes dont la chair, pleine d’arrêtes, porte un étrange goût de vase, et à proximité des basses-cours où la saveur des poulets aux pattes bleues est digne d’une table présidentielle.
Après une enfance paisible dans une famille aimante et croyante, j’ai fréquenté le « Cha » désormais appelé Centre Laennec Lyon. J’ai tiré de cette expérience deux conclusions : jamais plus ce genre de lieu et jamais plus les jésuites ! De fait, pendant la suite de mes études de médecine à Paris, je n’ai jamais voulu aller au Centre Laennec et n’ai jamais fréquenté les jésuites – sauf mon cher cousin Joseph. La vie est joueuse… Presque quinze ans plus tard, j’ai été accueilli au noviciat par un ancien directeur de l’institution lyonnaise. Mieux ! J’y ai été envoyé en activité apostolique pendant deux années lors de ma régence. Et me voilà aujourd’hui directeur du Centre Laennec Paris où j’ai la joie d’accompagner les étudiants en médecine.
Comment un tel retournement a-t-il pu se produire ?! En fait, à l’origine de ce retournement, la liberté intérieure a été est un élément essentiel dans ce discernement. Je l’ai tout de suite sentie auprès des quelques jésuites que j’ai fréquentés lorsque je me suis posé la question d’une vie consacrée, en particulier lors de ma première retraite ignatienne au Centre spirituel jésuite Manrèse à Clamart. Cette liberté est le fil rouge des Exercices spirituels. Elle est exigeante et ne supporte pas beaucoup les compromis. Mais elle donne la joie et la paix. En visitant le noviciat, j’ai senti que ma liberté était respectée et j’ai vu des jeunes hommes libres.
Dès le début des études médicales, j’ai éprouvé un intérêt pour l’anatomie pathologique. Il s’agit de diagnostiquer une maladie par les altérations morphologiques qu’elle produit. Pour cela, on examine des fragments d’organes au microscope. Voir est essentiel : porter attention à chaque détail, deviner ce qui va bien et repérer ce qui ne devrait pas être. Comme l’écoute, cela requiert une longue expérience et beaucoup de patience. Les erreurs commises sont le terreau de l’humilité. La médecine est un métier à nul autre pareil. Je ne l’exerce hélas plus depuis seize ans mais il a forgé ma manière d’être, de sentir, de voir et de comprendre le monde.
Je suis médecin par vocation et prêtre par accident. Le sacerdoce et encore moins la vie religieuse ne faisaient partie de mes plans. Il m’a fallu beaucoup de temps pour entendre l’Appel. Finalement, pendant mon internat, une tante religieuse de spiritualité ignatienne m’a persuadé de vivre une retraite de discernement chez les jésuites, au Centre Manrèse, comme je l’ai dit plus haut. J’y ai trouvé ce que je cherchais.
Après trois ans d’exercice professionnel, je suis entré au séminaire puis au noviciat de la Compagnie de Jésus. J’ai eu le privilège d’approfondir les questions d’éthique médicale au Boston College et à l’université Paris XI. A défaut de soigner les corps, quel que soit le ministère qui me sera confié à l’avenir, j’ai confiance en la Compagnie de Jésus pour m’aider et me soutenir afin de mettre en œuvre mon désir « d’aider les âmes ».
> Photo : Province EOF et Centre Laennec Paris