À une heure de route de Saint-Étienne, la communauté jésuite délègue deux de ses membres pour accueillir les pèlerins du sanctuaire Saint-Jean-François Régis sur la montagne ardéchoise. Quelles découvertes y ont-ils faites ? Quels enjeux de vie et d’apostolat ?

Que fait donc cette basilique, flanquée de deux clochers, visibles de la vallée du Rhône, perchée sur un col à 1080 mètres d‘altitude ? Elle témoigne de la ferveur de tout un peuple qui a bénéficié de la visite, au 17e siècle, de ce grand marcheur de Dieu qu’est saint Jean-François Régis : jésuite de la communauté du Puy, il est allé, porteur de l’Évangile, à la rencontre des villageois de cette Ardèche du Nord, à cette époque encore blessée par les guerres de religions. Il arriva épuisé, à Lalouvesc, à la Noël 1640. Dans la rudesse de l’hiver, il y décéda quelques jours plus tard. Les villageois tinrent à garder chez eux le corps de ce témoin du Christ. Aussitôt, un pèlerinage au rayonnement régional se mit en place ; les jésuites auront la charge de l’accueil des pèlerins dès le milieu du 19e siècle.

Une communauté d’hier et d’aujourd’hui

Je suis arrivé à Lalouvesc il y a deux ans, en binôme, d’abord avec le P. Olivier de Framond sj, puis aujourd’hui avec le P. Yves Stoesel sj. Arrivant dans ce petit village de 380 habitants après des années de vie urbaine à Saint-Étienne – qui ont pu me faire expérimenter les « foules solitaires » –, j’éprouve au cours des premiers mois, Covid et neige aidant, comme une « traversée du désert »… Un désert que nous découvrons tous les jours bien plus habité qu’il n’y paraît !

La basilique d’abord est elle-même bien habitée. Alors qu’en dehors des beaux jours, les visiteurs sont rares, une foule certes silencieuse mais attentive est présente : dans la fresque du chœur, l’œil attentif reconnaît les visiteurs venus auprès de saint Régis : anonymes ou familles connues, fondateurs d’ordre (Marcellin Champagnat et les Maristes, le curé d’Ars et sainte Thérèse Couderc et ses Sœurs du Cénacle).

La campagne surtout est habitée ; peuplée de personnes bien vivantes avec qui nous faisons connaissance : la communauté chrétienne locale, insérée dans une paroisse aux 17 clochers s’étageant tout au long de la vallée de l’Ay. Des liens se tissent avec les habitants, les commerçants et les acteurs de la mairie. Je découvre l’originalité d’une communauté « géographique » avec un destin lié, le désir d’un développement local, qui aide à dépasser les clivages et réunit, comme cette journée citoyenne de nettoyage du camping avant la saison. Des liens aussi avec l’école, ses institutrices et sa vingtaine d’enfants, qui témoignent de la présence de jeunes familles.

Pour l’accueil des pèlerins/randonneurs/touristes, Lalouvesc s’est efforcée d‘inventer et d’innover. Dès les années 1830, Thérèse Couderc fonde la congrégation du Cénacle pour l’accueil des femmes, perpétué, jusqu’à leur départ, par des sessions « familles » au beau succès. À nous, jésuites, de reprendre le flambeau, à l’aide de notre Maison Saint-Régis… et moyennant travaux ! Yves nous propose un plan qui rallie les suffrages… L’accueil, aujourd’hui, c’est aussi celui de familles ukrainiennes, dans une maison du village. L’accueil, c’est encore l’Abri du Pèlerin, où les randonneurs des chemins de saint Régis trouvent, de mai à octobre, un accueil rustique mais inoubliable !

Alors pourquoi venir à Lalouvesc ?

Comme en tant de lieux ruraux, une part de notre avenir se joue à Lalouvesc, sur la ligne de crête entre désertification rurale et désir d’un rapprochement avec la nature, d’une convivialité de proximité : un jeune couple réaménage une maison ancienne et aide d’autres à vivre en monde rural ; une jeune femme reprend l’élevage de son père et crée un circuit de commerce court ; un groupe familial restaure la grande maison des Sœurs de Saint-Joseph…

Sur le plan spirituel, saint Jean-François Régis nous apprend encore aujourd’hui, par son attachement au Christ, à construire de la communion entre nous et nous partage son charisme de la « Visitation ». Thérèse Couderc nous donne le goût de l’accueil avec son leitmotiv de la « bonté ». Lalouvesc, c’est un pari, dans lequel nous voulons être des acteurs, avec les Ardéchois, avec les villageois, qui nous invitent et que nous invitons à partager notre table, avec les visiteurs d’un jour, avec les groupes de pèlerins… et avec vous aussi : laissez-vous inspirer par l’altitude et le souffle de l’Évangile !

P. Michel Barthe-Jean sj,
Responsable du sanctuaire de Saint-Jean-François Régis à Lalouvesc,
Communauté de Saint Étienne-Lalouvesc

Découvrir la vie de saint Jean-François Régis

Son nom est devenu un prénom. Jean-François Régis est l’apôtre très populaire du Velay, du Vivarais et du Forez (Massif central), parcourant leurs campagnes durant cinq ans. Il fonde aussi des œuvres humanitaires : la soupe pour les pauvres de Montpellier, la défense des filles du trottoir et des dentelières du Puy-en-Velay. Il meurt à 43 ans à La Louvesc, le 31 décembre 1640, épuisé par sa longue marche pour atteindre ce petit village et porter à ses habitants la force de sa parole. Suivons-le depuis les vignobles de l’Aude jusqu’aux neiges de La Louvesc, où une basilique, lieu de pèlerinage pour toute la région, est maintenant élevée en son honneur. > Lire la biographie

Qu’est-ce que « L’Abri du Pèlerin » ?

Avec un magnifique panorama sur les montagnes de l’Ardèche, l’Abri du Pèlerin accueille chaque année entre 1500 et 2000 pèlerins, randonneurs et familles dans un esprit familial. Construit par les jésuites en 1923, entièrement rénové, l’Abri propose 99 lits en chambre simple, double ou en dortoir, idéal pour les petits budgets. Le lieu est propice à la convivialité entre pèlerins-randonneurs mais aussi avec les habitants. > Site internet

Visiter Lalouvesc

• Un parcours initiatique : la Basilique, la chapelle Saint-Régis, un musée et son diorama… mais aussi le Parc des pèlerins et son chemin de croix, la fontaine en haut du village… et la Maison Saint-Régis.
• Un parcours sportif avec  des circuits pédestres (Mont Chaix et Mont Besset), un club équestre, des vélos électriques.
• Lalouvesc s’inscrit dans l’association des « Villes sanctuaires » > En savoir +
• Découvrir la communauté jésuite Saint-Etienne-Lalouvesc

Cet article a paru dans la revue Échos jésuites, (été 2022), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci d’envoyer votre mail et/ou votre adresse postale à communicationbxl[at]jesuites.com.